Macron sur l’autoroute de l’autosatisfaction
Ce mardi, le président Emmanuel Macron s’adressait à la population à travers une allocution. Très attendue, beaucoup espéraient qu’elle serait l’occasion de faire un point sur la situation du covid et sur les mesures prises. Finalement nous avons pu assister au premier meeting du campagne de l’actuel président de la république.
Un petit passage sur la situation sanitaire
C’était la huitième prise de parole depuis les débuts de la pandémie. Nous nous étions habitués aux discours venant conclure chaque nouvel acte de cette crise. Face à une légère reprise de l’épidémie en France et en Europe, Emmanuel Macron a annoncé la troisième dose à laquelle serait conditionné le pass sanitaire pour les plus de 64 ans. Olivier Véran l’avait pourtant assuré en août, pas de pass conditionné à la troisième dose dès le 15 décembre. Évidemment, si Véran disait non, on aurait dû savoir que c’était oui. Le vaccin qui était la porte de sortie n’est plus qu’une aide. La crédibilité de la parole publique en prend encore un coup.
Le président n’a pas été très clair sur le conditionnement du pass sanitaire à la troisième dose, mais il semble qu’après 6 mois sans dose, le pass ne soit plus valide. La troisième dose sera ouverte pour les plus de 50 ans mi-décembre. Petit changement de ligne également sur la protection d’autrui. Le président a parlé de la vaccination pour se défendre soit, non plus les autres. Cela remettrait quelque peu en cause la vaccination des populations qui ne font pas de forme grave, notamment les enfants.
Emmanuel Macron a comme d’habitude eu ce talent pour nier les erreurs et même en faire des réussites. La France championne de la recherche ! Il précise sur le traitement, car la France est la seule grande puissance à ne pas avoir son propre vaccin. Il a également évoqué la force de l’Europe qui a permis à elle seule d’avoir des vaccins rapidement. La Grande-Bretagne en a eu avant nous après avoir quitté l’Europe mais cela ne doit être qu’un simple hasard.
Le premier meeting du candidat
Le traitement de la situation a été très rapide et les décisions très peu expliquées. Le covid n’était au fond pas vraiment le sujet de cette prise de parole, nous étions hier devant le premier meeting de campagne du candidat Emmanuel Macron. La gestion du covid était une parfaite excuse pour se permettre cette visioconférence de vingt-sept minutes.
Nous sommes entrés dans un tunnel d’autosatisfaction. Le premier sujet abordé a été les aides que l’État a apportées. Nous sommes en période de Noël, les parents vont pouvoir faire des cadeaux à leurs enfants. Avec les aides de l’État, ce sont les enfants qui en font, puisqu’ils devront rembourser le coût de ces aides. Pour un président qui voulait réduire la dette, Emmanuel Macron ne manque pas de cynisme.
L’hôpital sera ravi d’apprendre qu’il ne s’est jamais aussi bien porté. Grâce au Ségur de la Santé, les choses ont changé, le numerus clausus a été supprimé et les salaires augmentés. On recrute également de nouveau ! On ne parle pas du nombre de démissions, des lits fermés et des hôpitaux sous tension permanente.
Côté sécurité également, le sentiment d’insécurité n’a jamais été aussi fort. Les chiffres sont formidables, moins de cambriolages et des saisies de drogue record. Le cambriolage est évidemment l’arbre qui cache la forêt. Les violences physiques et sexuelles, les homicides et tentatives d’homicide ont explosé. Le confinement avait peut-être permis de cacher la réalité mais elle revient au grand galop.
L’économie se porte mieux. Le plan d’investissement européen aurait permis de relancer le pays ! La France a reçu 40 milliards de dollars. Cela nous aurait peut-être été bénéfique s’il ne nous en avait pas coûté 60… Le pouvoir d’achat augmente et la pauvreté baisse. Il serait intéressant de savoir combien de Français sentent que leur pouvoir d’achat a augmenté, et ce d’autant plus que les prix de la plupart des produits de consommation ont crevé les plafonds depuis cinq ans.
L’axe principal a été le travail. Le président l’a dit et redit, il faut travailler. D’après lui il y a des offres à pourvoir, il n’est donc pas normal qu’il y ait des chômeurs. Pas de mise en perspective de ce que sont ces offres, du niveau de formation et des salaires proposés. La réforme de l’assurance chômage doit rendre son accès plus difficile et les aides plus faibles. De surcroît, les chômeurs devront prouver une véritable recherche de travail afin de pouvoir continuer à percevoir les aides.
La réforme des retraites est abandonnée. Le président réformateur sera le premier président à ne pas toucher aux retraites. Des mois et des mois d’argent engagé, de grèves et de bagarres politiques pour rien. La grande réforme du système par répartition n’en sera pas une et le candidat annonce déjà vouloir se tourner vers une réforme paramétrique où l’on repoussera l’âge de départ et supprimera les régimes spéciaux.
Sur le volet écologique, Macron fait la chasse à l’électeur de droite. Lui qui avait commencé son mandat en houspillant le nucléaire et en validant la fermeture de Fessenheim décide finalement de promouvoir le nucléaire. Un changement de pied louable qui ne le serait plus s’il ne sentait pas l’électoralisme. Avec le plan 2030 Macron va investir, il ne dépense pas, un peu plus de 30 milliards.
Un candidat qui se voit déjà élu
Cette allocution était évidemment un meeting aux airs de futur programme. Se servir du covid dont les Français semble approuver sa gestion et qui continue de susciter un effet de sidération était assez cynique. Pas de mea-culpa, de mise en perspective, tout a très bien “marché”. Il se place déjà dans la continuité de ce qu’il n’a pas entrepris.
Emmanuel Macron ne prend pas non plus la peine de parler des sujets d’immigration ou d’insécurité qui font pourtant la une. Depuis le centre de Paris, ces problèmes semblent au pire ne pas exister, au mieux lointains. Il évite soigneusement tout sujet embarrassant qui pourrait le mettre face à une réalité et un bilan dérangeant. Macron s’imagine déjà arrivé, la campagne risque de le mettre face à ses réalités.